Cela fait maintenant un mois que nous sommes au centre de retraite yogique, à 30 minutes de Sydney. Jusque là nous n'avions donc pas publié d'articles, car il n'y avait rien de spécial à raconter, mais on commence à nous demander des nouvelles et nous dire justement que le blog n'est plus alimenté. Ma mère a même cru au début qu'on était tombé dans un secte, coucou les raéliens !

Alors je vais vous raconter un peu comment ça se passe par ici, et combien la vie est belle au pays du yoga. Nous avions trouvé cette adresse via le site Helpx, qui nous avait également permis de trouver les précédentes adresses où nous avons habité (Cairns notamment, à notre arrivée). C'est d'ailleurs là bas, à Cairns, que notre collocataire Anglais, pratiquant le yoga également, nous avait dit "olala à côté de Sydney il y a un endroit il faut que vous y alliez c'est trop génial."Et en consultant mes mails, je m'étais rendu compte que j'avais reçu un mail du directeur de l'établissement, quelques semaines auparavant, qui nous proposait de nous nourrir et héberger en échange de quelques heures de boulot chaque jour. Coïncidence, on se dit donc qu'il faudra aller y faire un tour. 
Et c'est ainsi qu'on se retrouve à débarquer ici, début Avril, après s'être bien caillé les miches dans le Sud du pays. En remontant de Melbourne à Sydney, en 3 jours on a gagné 20 degrés, incroyable comme contraste. 

A notre arrivée, nous sommes accueillis par Lyndon, le manager de l'ashram, 35 ans, bouclettes sur la tête (nous apprendrons par la suite qu'avant les bouclettes il avait des dreads jusqu'aux fesses, charmant).
Il nous amène à notre chambre. SUPERBE. Cela faisait 3 mois que l'on dormait dans le van, c'était donc merveilleux pour nous d'avoir une vraie chambre avec un vrai lit (king size qui plus est), une vraie salle de bain, top confort. En voyant ça on se dit qu'on ne va plus jamais décoler d'ici.
On rencontre les autres membres de l'équipe, tous bénévoles comme nous, logés et nourris.
Il y a un autre couple de français, Solen et Florian, bientôt la trentaine (je suis obligée de dire BIENTOT sinon je vais me faire insulter …). On apprendra à vraiment sympathiser au fil des jours et nous les considérons aujourd'hui, après un mois 24h/24 ensemble comme des amis, nous avons de nombreux points communs. Il y a un suédois, Lukas, qui est perché au plus haut de la cime du plus grand arbre qui existe sur cette planète. Le mec il fabrique des trucs improbables en cuisine, des boissons mixtures bizarres, des trucs qui fermentent, et le pire c'est qu'il a l'air de vraiment se régaler quand il boit ça. Perso j'ai testé, ça a le goût du potager trop arrosé, vraiment pas top.Il est le cuisinier ici. Lorsque des "guests" (comprendre : clients, mais ici on les appelle les invités) sont là, parfois uniquement du vendredi au dimanche, parfois du mardi au dimanche, il s'occupe de faire les repas midi et soir. La cuisine est végétarienne, il faut donc veiller aux apports en protéine à travers d'autres aliments, c'est son job. Il est franchement doué en cuisine, même si parfois on a l'impression qu'il nous fait toujours un peu pareil d'une semaine à l'autre. Et pendant son temps libre il court sous la pluie torse nu, il médite en dansant sur des musiques improbables, il peint avec ses pieds des plateaux en bois, ou alors il cherche des perles à se mettre dans les cheveux. C'est le profil le plus atypique que l'on a ici. Il y aussi Chris et Mike, deux allemands très sympa. On a aussi eu une américaine qui est restée une dizaine de jours, Kaleigh, avec qui on s'est très bien entendu. De toute façon ici je crois qu'il n'est pas trop possible de détester quelqu'un, tout le monde est ouvert, agréable, posé. 

L'ashram a été créé dans les années 1960, par Swami, une indienne d'une vingtaine d'années à l'époque, très populaire dans le domaine du yoga, elle a participé à répendre sa popularité en Australie à cette période. Elle avait une émission matinale où elle présentait des enchainements, c'était la révolution à cette époque. Elle a commercialisé de nombreux produits dérivés, des produits cosmétiques 100% naturels, des livres, des VHS (puis par la suite des DVD).

Aujourd'hui, elle vit toujours à l'ashram, mais, à plus de 80ans, elle souffre d'Alzheimer et de démence (une gentille démence). Elle est donc prise en charge par son frère et la femme de son frère, que nous appelons affectueusement Auntie et Uncle (tata et tonton), et qui vivent ici avec nous. Ils ont presque 70 ans mais ils pètent le feu. 100% indiens, leur accent anglais est vraiment drôle, ils roulent les R à n'en plus finir (brrrrrrrreakfast), et souvent on comprend franchement quedalle à ce qu'ils disent. Mais on rigole bien avec eux. La tante cuisine parfois pour nous. De la vraie cuisine indienne, les épices et tout et tout. Sa spécialité c'est mettre du chili partout, même dans des plats qui ne sont pas les siens d'ailleurs. Elle passe en cuisine, elle voit un truc qui mijote, elle goûte, c'est (toujours) trop fade pour elle (normal sa langue doit être brulée au 3ème degrés…), du coup elle rajoute des piments. On a eu quelques bonnes surprises, thank you auntie.
La spécialité de Swami, c'est de se balader un peu partout dans l'ashram et de piquer des trucs, de les changer de place, de les cacher. Et comme elle ne se souvient de rien, on retrouve jamais les choses en question. On a passé des après midi entières en mode chasse au trésor pour retrouver des clés de voiture qu'elle avait au final caché dans une housse d'oreiller de canapé. Quelle blagueuse cette Swami. 
Son fils, Sanjay, la quarantaine, a repris la direction de l'établissement lorsque sa mère est tombée malade. Au quotidien c'est donc lui qui gère le bazard, mais de loin (trèèèèès loin même, car il est a peu près sur la même planète que notre ami suédois Lukas, perchitude 100%). Du coup il a embauché Lyndon, le manager qui est censé vraiment gérer l'endroit et répartir les rôles de chacun. Et enfin il y a Beny, le beau frère de Sanjay (oui ça parait un peu compliqué tout ça j'aurai peut être du faire un arbre généalogique finalement). Beny il a la quarantaine, il est pas perché en mode méditation zen et compagnie, mais disons qu'il doit avoir deux ou trois fils qui se touchent là haut. Vraiment ce n'est pas méchant quand je dis ça, il est adorable, le coeur sur la main tout le monde l'apprécie (moi la première),mais on pleure de rire à chaque fois qu'il entreprend quelque chose,  on ne peut plus lui laisser la tronçonneuse dans les mains ou un briquet, il est trop dangeureux pour lui même. Derniers exemples en date, on devait bruler un matelas (car infesté de puces de lit), il a quand même réussi à faire partir le feu en gardant dans la même main que le briquet allumé le bidon d'essence, plein forcément. Il a "oublié" d'enlever son pied du matelas, du coup il s'est brûlé. Il a aussi cassé son téléphone 2 fois en une seule semaine, et la voiture "utilitaire" utilisée pour l'entretien des 24 hectares de terrain est une épave sans vitres, sans rétros, sans pare choc avant, tout ça signé Beny forcément. Voilà, on est tout ce petit monde à vivre joyeusement dans ce bel endroit, il y a une belle piscine, un jacuzzi et un hammam, de grands espaces verts, un potager que Solen et moi essayons de faire grandir, et une grande salle de yoga que je me régale à occuper chaque matin, de 6h à 7h, quand tout le monde dort encore. Ah, j'allais oublier de parler de Abbie, le chat de l'ashram. Il nous a choisi comme nouveaux maitres, il dort avec nous toutes les nuits. Le moins qu'on puisse dire c'est qu'il se gêne pas, il se pose sous les couvertures en plein milieu du plumard, normal. Le pire c'est qu'il ronfle incroyablement fort, je n'ai jamais entendu un animal ronfler à ce point. Mais il est si mignon, on peut pas le mettre dehors le pauvre.

En moyenne nous recevons une vingtaine de guests par semaine. Lorsqu'ils sont là il y a donc 2 cours de yoga par jour, plus un cours de méditation. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que le profil des gens qui viennent dépoussière les stéréotypes que l'on peut avoir quand on parle de yoga et de méditation. Ici, pas de pantalon en chanvre, pas de dreadslocks, pas de teeshirt à fleurs colorées et pas de perles dans les cheveux (excepté dans ceux de Lukas). On voit des gens qui ont juste envie de faire un break de leur vie quotidienne, de leur train train, et qui veulent recharger leur batterie. 
Nos tâches quotidiennes varient. Lorsque des guests sont là nous sommes principalement chargés du service des repas, de la vaisselle et du nettoyage des extérieurs. Lorsque les guests partent, on s'occupe avec Solen de nettoyer les 10 chambres, pendant qu'Adrien est d'avantage concentré sur les problèmes techniques. C'est pas des champions du bricolage ici, alors Adrien pour eux c'est un peu un sauveur qui trouve une solution à tout (faut dire aussi qu'il arrive toujours à tout réparer). Il y a aussi les 24 hectares de terrain à entretenir, il y a de la forêt, des petits sentiers, du "bush" (en gros ça veut dire du bordel végétal sans nom), les garçons Chris et Mike sont généralement chargés de ça. 
Le soir souvent les garçons jouent au billard ou au ping pong, moi j'en profite pour lire, pour pratiquer un peu de yoga toute seule, pour cuisiner des gâteaux (sinon ici c'est la loose du sucre y'a pas un biscuit qui traine, R.I.E.N !). 
Dernièrement nous avons trouvé un perroquet dans le jardin, bagué donc domestique (ici on pourrait se poser la questiont tellement les oiseaux sauvages sont superbes). Adrien lui a construit une cage 5 étoiles, et j'ai passé des annonces sur internet pour rechercher le propriétaire. 
Normalement quelqu'un vient ce soir pour voir si c'est le sien. Mais avec la cage de fou qu'il a, je doute que l'oiseau veuille repartir d'ici :)

Hier j'ai donné mon premier cours de yoga. Ce n'était pas prévu du tout, et théoriquement, n'ayant pas le diplôme de professeur, je ne peux pas enseigner (normal). Mais des nanas de sont pointées à l'ashram, tapis sous le bras, en mode "bonjour on vient pour le cours", sauf que y'avait pas de cours. Le manager est donc venu me chercher dans la chambre pour savoir si je pouvais faire le cours moi. Les nanas avaient fait la route jusqu'à nous, il aurait été frustrant pour elles de leur dire de partir comme ça. Après être passée par toutes les couleurs de l'arc en ciel et dis 100 fois "SERIOUSLY ??", j'ai finalement dit oui, et j'ai vraiment bien fait. J'ai pû tester ce que ça pourrait donner, et j'ai franchement adoré. Et, surprise, les nanas aussi étaient ravies. Cela confirme encore un peu davantage la direction que j'aimerai prendre professionnellement dans le futur. Reste "plus qu'à" me trouver un centre de formation en Inde et c'est dans la poche :) 

Bref voilà, on en est là, loin de tout stress, toute pression, de toute problématique existentielle (le plus gros problème qu'on ait rencontré en 4 semaines c'est le hammam qui est tombé en panne …), dans une ambiance familiale et chaleureuse, entourés de gens passionnants, atypiques, drôles, on mange bien, on a un super cadre de vie, des trucs cools à faire tous les jours (et des trucs moins cools certes), et on rigole franchement bien (Beny et Swami y sont pour beaucoup). 
Et puis honnêtement, c'est bien le seul job au monde où je peux dire à mon "boss", quand il me demande de faire quelque chose "non désolée je peux pas là j'ai méditation". Et entendre en retour "ah oui c'est vrai vas y vite, profites en bien, et si tu veux prendre une heure après pour finir de te relaxer, n'hésites pas, on fera le ménage plus tard rien ne presse". MERCI CHEF, COEUR AVEC LES DOIGTS. 

Nous verrons pour reprendre la route prochainement, je ne sais pas quand exactement nous n'avons rien de planifier. Nous aimerions voir le centre du pays, puis tracer faire la côte Ouest. Encore quelques milliers de kilomètres en perspective donc. Notre visa expire fin septembre, et dans l'idéal nous aimerions terminer par là où nous avons commencé : Cairns, le refuge d'animaux et Britta, celle qui nous avait hébergé les 2 premiers mois. A la suite de ça, nous voudrions faire un peu l'Asie, la Thaïlande pour commencer, et voir où le vent nous porte par la suite.
Mais t'inquiète Maman promis, quand on a fini de faire le tour, on rentre à la maison :)